Résumé du roman : Chasses Gardées
Bienvenue dans les coulisses de la recherche scientifique en France. Après trente années passées dans différents laboratoires en région parisienne, sous les tropiques et jusqu’aux rives du Saint-Laurent, Antoine Galion dresse un bilan critique de sa carrière. Homo homini lupus est, telle est la première impression qui nous reste après la lecture de ce récit. Même dans les secteurs de travail les plus prestigieux, comme c’est le cas dans la recherche, les bas instincts humains ressurgissent. Plutôt que de servir à son échelle la noble cause de l’accroissement des connaissances dans un climat stimulant, ce chercheur doit subir un système hiérarchique autoritaire et rigide, souvent opaque et dominé par le népotisme, mais aussi faire face au harcèlement moral et à un racisme latent.
La couleur de peau noire d’Antoine Galion n’a pas facilité son intégration dans les différents laboratoires où il aura exercé durant sa carrière. Ostracisé et moqué à maintes reprises, l’homme témoigne de ce climat pesant et contre-productif.
Il s’agit d’un ouvrage honnête, touchant, où l’on sent tout l’amour de l’écrivain pour son métier. C’est aussi la parole d’un homme libre qui dénonce l’injustice et l’ostracisme avec recul et intelligence.
À propos de l’auteur : Raymond Christon
Raymond Christon, né en 1944 à Pointe-à-Pitre (Guadeloupe) a fait ses études universitaires en France où il a passé l’essentiel de sa carrière de chercheur. Retraité dans le sud de la France, il se consacre à la vulgarisation des connaissances sur la prévention nutritionnelle des maladies cardiovasculaires, mais aussi à l’écriture, la randonnée et les voyages.
Extrait du livre Chasses Gardées
Allo ! Fred, appelle vite le SAMU, viens tout de suite, tout de suite, c’est urgent, c’est grave ! Antoine… il lui est arrivé quelque chose… »
Affolée à la vue de mon visage boursouflé, de ma démarche titubante et par le son de ma voix, faible, rauque presque inaudible, ma sœur, les yeux écarquillés de stupeur, s’est précipitée sur son téléphone.
Quelques minutes plus tôt, au volant de ma voiture, j’ai commencé à avoir du mal à respirer. Sentant ma gorge se resserrer, ma respiration devenir de plus en plus haletante et la peau de mon visage me tirailler, j’ai bifurqué vers le centre-ville et me suis garé en catastrophe sur le trottoir en face de chez elle. Un peu plus tard, couché sur le dos, je peine à ouvrir les yeux, tant mes paupières sont lourdes, gonflées. J’ai du mal à distinguer ce qui m’entoure. Tout me semble flou. J’ai l’impression de ressembler à un ballon difforme. D’une main je tâte quelque chose qui me gêne au niveau du coude et comprend qu’il doit s’agir d’un dispositif de perfusion.
Près de ma tête je sens une présence et une autre à mes pieds. Aux taches blanches, je devine qu’il s’agit d’infirmiers ou de médecins, ailleurs une autre personne, peut-être mon frère Fred, dont j’ai cru reconnaître la voix et l’allure, dans un flou de film d’horreur. Par la fenêtre entre-ouverte, des bruits sourds et incessants me parviennent de la ville. J’ai la gorge de plus en plus serrée, je manque d’air. Telle la lave fluide d’un volcan, l’œdème colmate toutes les issues, progressivement, irrémédiablement. J’ai chaud, j’étouffe dans cette cage roulante. Je suffoque, je me sens partir, tout s’embrouille dans ma tête, je pense que tout est malheureusement fini, que la situation est irréversible. Le « pin-pon » caractéristique d’une ambulance me fait réaliser que l’on me conduit à l’hôpital. Elle file à vive allure. J’espère qu’elle a pris la voie rapide car il y a tant de monde et d’enfants le matin dans le centre-ville qu’elle risquerait d’arriver trop tard.